Le Blog du Cours Florent

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« Mais vous pleurez, Milord ! »

Quentin Mermet, élève de 3ème année et universitaire à ses heures, s’empare du blog pour y déverser une part des pensées qui l’agitent en un long tunnel, mais qui mérite d’être traversé. Je dirais même plus, engagez-le dans votre gueuloir personnel et allez-y de votre voix et de votre… émotion.

Celle-là est celle qui se fait attendre… On l’attend ! de pieds fermes !… Celle-là ! la Larme ! le flot ! la cascade lacrymale sur épiderme facial !… On croit l’attendre. On croit que son advenue constituera l’antidote à tous nos maux… Alors, on l’attend… Et elle finit par arriver, la vilaine ! la salée ! Elle finit par daigner entrer en scène, par faire son apparition éphémère et distinguée… Est-elle suivie par d’autres ? des voisines ? des consœurs de contrition ?… Disons que cela est finalement le cas, que l’effusion est au rendez-vous, là, à cet instant précis, balayant toute considération annexe et superficielle pour se fondre en pleurification éternelle. Bravo ! Magnifique ! Splendide !… Mais après ? Est-ce tout ?… C’est bien court, bien fadasse ! Qu’avait-elle donc – entend-on alors murmurer – qu’avait-elle donc à geindre ainsi, comme une vulgaire chienne dont on aurait noyé les petits, si tout ce qu’il nous en est proposé n’est qu’une face ruisselante et morveuse ? (questionnement légitime)… Et l’émotion dans tout ça ? l’émotion ? « Émotion », ça y est le mot est lâché ! La sentence ! l’ultime subjection !… Eh bien, kopek ! mes frères ! Pas le moindre bout d’un tiers de quart d’une parcelle de sensation quelconque ! Ça tient du mystérieux ! de l’étrange et du pathétique ! Le pathétique, là, on y est ! et dans le cœur ! dans le juteux du pathos et tous ses artifices ! Mais cela suffit-il ?… Qu’est-ce qu’une larme ? Une goutte, seulement. Un agglomérat moléculaire ! En vérité, la chialure n’a de distinct d’avec l’éjaculation que la non-séminalité de sa composition. Le sperme, lui, a l’avantage de la fertilité !… Mais n’avons-nous pas entendu répéter, par l’entremise d’une multitude de bouches anonymes, que les pleurs s’acoquinaient aisément, voire intrinsèquement, à l’émotion ? Cela n’est-il pas le plus commun des lieux communs ?… Mais le fait est que par ce fin raisonnement syllogistique, on en vient à confondre le moyen de la fin. Grave erreur ! Erreur gravissime car récidivée ! Que l’actrice soit émue (usons d’un exemple féminin tout à fait fortuit), que l’actrice en vienne aux larmes, en vienne à la suppuration purgative des ses glandes lacrymales par la stérile masturbation de ses schèmes sensori-moteurs, qu’importe ! Qu’importe ! A-t-on décemment payé pour assister à pareil spectacle ? à l’exhibition de la si convenue défaillance de quelque comédienne éplorée en mal d’introspection post-œdipienne de son « moi » profond, qu’elle redoute de laisser trop ingénument (trop duras-sement) aux talents de celui qu’elle nomme son « amant », l’un de ses « amants », l’un de ses fervents partenaires sexuels non syndiqués qu’elle aime appeler ses « amants », faute de ne savoir ni leur nom ni ce qu’est l’amour… A-t-on payé pour « ça », mes amis ? pour cette interminable plainte suintante et lénifiante ? Ou comme le dirait Alfred de Musset : « Crois-tu donc que je sois comme le vent d’automne, / Qui se nourrit de pleurs jusque sur un tombeau, / Et pour qui la douleur n’est qu’une goutte d’eau ? »… En réalité, tout cela ne relève que d’un odieux narcissisme, tout ce qu’il y a de plus consommé et de plus consensuel, énième éructation de ce paradigme moderne de l’hégémonie de la performance et de l’ostentation ! Ce qui compte aujourd’hui, c’est la matière ! la matière seule ! Le reste aux cochons, ma vieille ! et qu’on cesse de discourir sur le néant… Le « pathos » n’est que la suprême forme du dégoût. Suprême car excessive, impudique et obscène ! Excès qui n’a de « sens » et d’existence que par le viol de l’intimité, cédant finalement sous les accès répétés de ce halètement poussif et fébrile ! Vagissement simiesque !… Que tout ceci est des plus tristes, et des plus bas, et des plus bêtes, et des plus lourds.

L’émotion est, de suite, séquestrée par l’intrépide interprète qui n’a plus d’autre souci que de se gargariser les oculaires avec ersatz de passions et simulacres de fièvre ! C’est l’amalgame ! l’amalgame tragicomique entre ce que doit ressentir le spectateur d’un côté, et de l’autre l’acteur lui-même. La fin et le moyen dont je vous parlais, ils se posent exactement là, entre la honte et l’oubli. Oubli de ne plus savoir pourquoi ! pourquoi tout ce grotesque ! Honte, de ne plus savoir jouer pour l’autre !… A force de parler de quatrième mur, on a fini par y accrocher un miroir dans lequel on se contente de se regarder palabrer. Honte, de ne plus voir, face-public, que la familière image de sa propre personne, plus que soi-même dans la plus pénible des crudités ! Qu’il n’y a que « moi » à satisfaire, et personne d’autre ! Point de don ! Point de générosité ! Ultime extase égotiste et solitaire ! Car comme le dit Roland Barthes : « En pleurant, je veux impressionner quelqu’un, faire pression sur lui. Ce peut être l’autre que l’on contraint ainsi à assumer ouvertement sa commisération ou son insensibilité, mais ce peut être aussi soi-même : je me fais pleurer, pour me prouver que ma douleur n’est pas une illusion : les larmes sont des signes, non des expressions. »… L’on peut, de la sorte, par les larmes, signifier la douleur et la lamentation. Signifier, certes oui. Mais signifier n’est pas tout. Signifier n’est qu’un des régimes possibles de la représentation ; c’est se désigner soi-même, interprète, comme « être souffrant », se le représenter ça, et le donner à voir le plus simplement du monde. « Je suis l’homme/la femme en larmes devant vous. Contentez-vous de m’appréhender en tant qu’entité traversée d’affliction, ne me jugez pas », voilà ce qui doit être muettement entendu, « ne vous sentez pas obligés de vous abaisser à vous complaire pitoyablement dans les méandres de cette obscure lubie néo-moderno-ludo-victimaire qu’est l’illusion empathique et compassionnelle (dont certains, à l’heure actuelle, on fait un fond de commerce florissant) »… Mais de cela, nous ne faisons que rarement le constat… Je suis bien conscient que les plus malins me rétorqueront que l’ultra-sensibilité, voire la féminisation généralisée, fut une valeur plus que positive au dix-huitième siècle, siècle ô combien reconnu pour sa propension à n’avoir su féconder que des esprits dégénérés de rationalisme oligarchique que l’on a très ironiquement regroupé sous l’appellation d’origine incontrôlée : « les Lumières ». Alors, que vous preniez exemple sur notre fierté nationale panthéonisée le tragédien négrier et trafiquant d’armes Voltaire, grand bien vous fasse ; mais ne croyez pas que cette triste période décadente dont l’action s’est résumé à convertir quelques larmes bourgeoises en bain de sang bleu conduisant irrémédiablement à la prise de pouvoir de ce nouveau Dieu qu’est la philosophie utilitaro-capitaliste dont nous sommes les héritiers directs, soit le plus admirable des modèles… Aujourd’hui, « Théâtre » semble avoir subi une mutation sémantique impalpable.

Du mot, je parle, du mot « théâtre ». De son étymologie plus précisément, « teatron » en grec : « l’endroit où/d’où l’on voit », terminologie qui présupposerait logiquement que l’on montre quelque chose sur scène, que l’on désigne, que l’on offre à l’attention de spectateurs avisés et éveillés quelque objet scénique aussi piteusement dramatique qu’il suffit qu’il soit pour être considéré aujourd’hui comme relevant du « Théâtre » (acception contemporaine du terme qui balaie un champ de possibles aussi large que flou)… Désormais, on exhorte l’émotion ! on quémande l’émotion ! on marchande l’émotion ! on se prostitue outrageusement à grands renvois de déchets visuels et sonores avec lesquels on badigeonne la face du public dans l’espoir d’obtenir, par ce biais, ne serait-ce qu’une once d’émotion (n’est-ce pas, M. Mouawad ?)… Justesse. Justesse, mes camarades. Je vous en prie, un peu plus de justesse pour nettement moins de chantage et de racolage. Seule la justesse de l’intention. Une parole adressée et juste. Juste adressée, sans arrière pensée. Et advienne que pourra… L’on n’a décidément jamais vu l’Emotion se reproduire par contagion… Et Paul Valéry pour conclure : « La voix humaine me semble si belle intérieurement, et prise au plus près de sa source, que les diseurs de profession presque toujours me sont insupportables, qui prétendent faire valoir, interpréter, quand ils surchargent, quand ils débauchent les intentions, altèrent les harmonies d’un texte, et qu’ils leur substituent leur lyrisme au chant propre des mots et des chants combinés. »

Quentin Mermet

La nouvelle jeunesse du Théâtre de Poche

Stéphanie Tesson reprend les rênes de lieu mythique du paysage théâtral parisien. Les travaux ont embelli l’espace, surtout le hall d’entrée, agrandi, meublé de bois blond et doté d’un bar accueillant.

 

Audiberti revient sur les lieux même de sa création. Stéphanie Tesson met en scène les tribulations échevelées d’Alarica, princesse de Courtelande, sur le territoire de l’électeur de Saxe. La pure, la vierge jeune fille est à la veille des ses noces. Elle a vécu jusqu’alors dans l’ignorance du mal. Son beau rêve va se broyer, car… le mal court. Au petit matin, elle reçoit des visites pour le moins inopinées…

On ne racontera pas la suite. Il faut se laisser emparer par le style flamboyant, inimitable de ce fou des mots, qui baptisait sa pièce « sérénade philosophique ».

Plus de soixante ans après la création, qui révéla au public la prodigieuse Suzanne Flon, la nouvelle directrice des lieux exhume le climat des années 40 et choisit une esthétique volontairement datée. Décor, costumes, maquillages nous racontent à la fois un XVIIIème siècle de rêve et le théâtre de la toute après-guerre. Cette transposition allègre nous déplace comme par enchantement. Les acteurs aussi trouvent dans leur jeu une tonalité juteuse dont l’expression choque au début et qui finit par emporter l’adhésion.

Julie Delarme, Alarica, compose une petite poupée de porcelaine aux joues et aux lèvres trop rouges. Sa gouvernante, Toulouse, a les traits et la voix grotesquement viriles de Josiane Lévêque, qui gronde fort et s’oppose à la donzelle. Puis arrivent un inconnu qui dit être le roi (malicieux Mathias Maréchal), un lieutenant que reconnaîtrait Offenbach (Anthony Cochin), le vrai roi Parfait XVII, délicat damoiseau, (que joue avec une délicatesse subtile Emmanuel Suarez) escorté d’un cardinal matois et fielleux (Didier Sauvegrain), j’en passe et des plus savoureux, les inénarrables Jean-Paul Farré et Marcel Maréchal, archanges tutélaires de cette joyeuse troupe. Tous s’accordent à merveille pour mettre en relief la poésie de l’auteur.

A noter aussi deux autres spectacles :

A 19 heures, Minyana revient vingt-ans six après avec Inventaires. Robert Cantarella revisite ces fameux monologues avec les créatrices d’Angèle, Jacqueline et autre Barbara, l’une avec sa robe, l’autre sa cuvette et la troisième son lampadaire. Florence Giorgetti, Judith Magre et Édith Scob rivalisent de dingueries, drôlement folles ou follement drôles, au choix.

Au sous-sol, l’espace a été totalement repensé et propice à un travail particulier. Charlotte Rondelez y propose son Hamlet, sous le titre joliment potache de To be Hamlet or not. Une joyeuse promenade avec Shakespeare et son héros. Les acteurs virevoltent à l’envi avec le texte et sur une tournette. Tout cela sous le signe de la liberté.

On souhaite à cette nouvelle équipe du Théâtre de Poche un beau voyage au long cours.

FXH

http://www.theatredepoche-montparnasse.com/

Vélociraptor, gruyère et Osiris

A partir du 6 février, Maxime Dechelle foulera à nouveau les planches du théâtre du Marais pour y présenter son one-man-show: « Vélociraptor, gruyère et Osiris » mis en scène par Julie Lavergne et Florent Chesné.

A 22 ans seulement, le jeune homme est déjà une star montante du stand-up parisien. Ayant déjà rempli la salle prestigieuse du Théâtre des Blancs Manteaux il y a quelques mois, l’artiste s’est aussi fait remarquer par un large public lors de scènes ouvertes ou en participant à la fameuse émission de Laurent Ruquier : »On ne demande qu’à en rire ».

 La force principale de Maxime Dechelle c’est son originalité. Loin des habituels sketchs sur les relations hommes/femmes ou la politique, les textes du comédien sont drôles mais aussi éducatifs. Ce one-man-show piquant surprend le spectateur en mettant en scène la création de l’univers, la vie d’une particule de canabis, ou le mythe d’Osiris.

L’artiste s’en explique : «  Je suis un féru de sciences et d’histoire alors quand je me suis mis à écrire mon spectacle c’était pour moi une évidence de parler de toutes ces choses qui me passionnaient et qui me passionnent toujours».

 Maxime Dechelle est aussi un prodige de la métamorphose. Son corps élastique se transforme à volonté. De la standardiste dynamique au Vélociraptor sorti tout droit du film Jurassic Park, les interprétations du jeune homme transportent le public dans différents univers. Les personnages sont loufoques mais le jeu sincère.

La mise en scène de Julie Lavergne et Florent Chesné est intelligente et ne laisse pas de place aux temps morts. Ce spectacle en évolution constante est drôle, ingénieux mais aussi touchant.Si bien qu’à la fin le public en redemande.

Vous pouvez retrouver le one-man-show « Vélociraptor, gruyère et Osiris »à partir du 6 février tous les dimanches à 19h30 et les mercredis à 20h au théâtre du Marais. Maxime sera aussi présent en direct dans l’émission »On ne demande qu’à en rire », sur France 2 le 12 février à 17h55. Il y présentera un sketch soumis aux votes des spectateurs.

Roxane Michelet

Retrouvez Maxime Dechelle sur facebook: http://www.facebook.com/maximedechelle?fref=ts

Lien Billet Reduc: http://www.billetreduc.com/85900/evt.htm

 

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